A
la télévision, aucune information digne de ce nom ne filtrait. Comme
d’habitude, on rassurait la population en disant que les autorités « gardaient tout sous contrôle ».
Mais c’était quoi ce tout ? Les
journalistes étaient rassurants, souriants même. Ils parlaient d’un rayon
invisible nocif qui miraculeusement avait pu être stoppé avant qu’il n’atteigne
les villes voisines. « On nage en
pleine science-fiction ! » se disait Irina tout haut, donnant
ainsi l’impression fugace qu’elle parlait à quelqu’un dans la
pièce. A force de vivre seule, elle avait développé quelques manies dont elle
était incapable de se débarrasser. Etait-elle donc la seule à observer le
manège nocturne des camions ?
Et
puis une nuit, les chevaux de Troie modernes ne vinrent pas. C’était la première
fois depuis vingt-huit nuits. Entre temps, en journée, Irina s’était rendue
compte que le silence de son immeuble était plus oppressant que d’habitude. Peu
de fenêtres avoisinantes étaient encore ouvertes. Il n’y avait plus d’enfants
qui criaient sur la place. Une voiture venait, de temps en temps, traversait la
rue, puis plus rien. Enfin, le commerce en face de chez elle, endroit
stratégique car c’était le seul endroit qui la poussait à quitter son nid et
affronter le monde extérieur, était résolument fermé. Même si elle avait pris
l’habitude de se nourrir avec parcimonie, vestige d’un temps où les privations
étaient plus nombreuses, ses réserves alimentaires n’étaient pas éternelles. Il
fallait trouver un plan B.
Sortir.
Sortir
et chercher.
Sortir,
chercher et affronter le monde extérieur.
Irina
décida de se donner quatre jours pour se faire à l’idée. Quatre jours pour
faire le point. Elle sortirait un mardi, jour habituel du marché, avant la
catastrophe.
(A suivre)
@Virginie Neufville